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TSA – La définition et les critères diagnostiques de l’autisme

Cet article se propose d’explorer la description des Troubles du Spectre de l’Autisme à travers ses critères diagnostiques. C’est une première approche qui donne l’occasion d’aborder une définition de l’autisme et quelques exemples concrets pour mieux cerner les notions spécifiques. Les critères, détaillés un par un, permettent de mieux comprendre ce qu’implique l’autisme pour les personnes concernées.


L’autisme est un trouble neurodéveloppemental (TND) dont les signes peuvent être identifiés avant l’âge de 3 ans. Le neurodéveloppement est l’ensemble des mécanismes qui, avant même la naissance, sont à l’origine des connexions entre les neurones dans le cerveau. Ces connexions sont impliquées dans de multiples fonctions : la motricité, la vue, l’ouïe, le langage, la cognition…Ce n’est pas une maladie, et cela ne se soigne pas. On naît et on meurt autiste.

Le diagnostic d’autisme s’appuie sur un ensemble de symptômes complexes. Le DSM-V (Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders, 5ème édition) introduit en 2013 la notion de Troubles du Spectre de l’Autisme (TSA), qui regroupe l’ensemble des expressions possibles de l’autisme. Il définit les items diagnostiques à travers la dyade autistique : Déficit de la communication et des interactions sociales, et caractère restreint des comportements et des intérêts. Elle est divisée en plusieurs critères :

1-Déficit de la communication et des interactions sociales : Déficit de réciprocité sociale et émotionnelle, Déficit du développement, du maintien et de la compréhension des relations, Déficit des comportements non verbaux
2-Caractère restreint et répétitif des comportements et des intérêts : Intérêts restreints ou fixes, anormaux dans leur intensité ou dans leur but, Intolérance au changement et adhésion inflexible à des routines, Hyper ou hypo sensibilité aux stimuli sensoriels, Mouvements répétitifs et/ou stéréotypés

Pour recevoir un diagnostic de Troubles du Spectre de l’Autisme, il faut que les symptômes soient présents depuis l’enfance (même s’ils n’ont pas été détectés à ce moment là, et même si la personne a appris à les cacher au fil des années), et qu’ils aient un retentissement significatif (une gène importante) sur le fonctionnement quotidien. La personne doit répondre à tous les critères de la catégorie 1, et à au moins deux critères sur quatre de la catégorie 2.

La difficulté du diagnostic est que l‘ensemble de ces troubles peuvent s’exprimer très différemment d’une personne à l’autre. Connaître ou rencontrer une personne autiste, n’est pas connaître l’autisme, mais bien une personne en particulier.

L’article développe ensuite les critères diagnostiques, et les illustre par des exemples concrets.


Les personnes autistes ont des difficultés à deviner et/ou comprendre les états mentaux des personnes avec qui elles interagissent. Les sentiments et les ressentis de leurs interlocuteurices leur sont énigmatiques s’ils ne sont pas formulés explicitement. Cette difficulté en réciprocité émotionnelle est à l’origine de nombreux faux pas sociaux, puisqu’elle empêche la personne autiste de donner la réponse adéquate.

Il est plus simple pour une personne autiste, d’aborder une conversation sous un angle factuel que sous un angle émotionnel, ce qui peut la faire paraître froide, distante ou hautaine, et engendrer des incompréhensions.

Lorsque quelqu’un annonce le décès d’un proche, on attend en retour une manifestation de soutien. Ce n’est pas intuitif chez un.e autiste, qui va se questionner sur le ressenti de la personne. S’iel l’a déjà entendu dire que son proche était pénible, elle va pouvoir penser que la personne se sent libérée par cette disparition. Le faux pas social serait de dire « Tu dois être soulagé.e ». De nombreux.ses autistes camouflent une partie de ce fonctionnement et apprennent en imitant leurs pair.es. Cela reste insuffisant : Je ne perçois pas la tristesse d’une personne, si celle-ci n’est pas clairement exprimée. Je ne peux donc pas ajuster mon comportement à son état.

Lorsqu’on communique, tout ce qui n’est pas un mot est une communication non verbale : Mouvements des mains, hochements de tête, expressions du visage, ton et volume de la voix. Les éléments non verbaux apportent une part très importante d’indices de compréhension : ils appuient et complètent le langage verbal. Selon les études d’Albert Mehrabian, professeur de psychologie de l’université de Californie, la communication non verbale représente 93% des interactions sociales. Les personnes autistes utilisent peu ou mal le langage non-verbal. Elles éprouvent également des difficultés à regarder dans les yeux, ou à maintenir le regard. Cela induit une impression de manque de franchise, ou de fuite. Le regard est un indice social important dans les interactions. Les personnes non oralisantes (personne qui n’utilise pas le langage oral pour s’exprimer) ne disposent pas des mots et ne peuvent utiliser que le non-verbal, ce qui complique encore la compréhension.

J’échange avec mon employeur à propos d’une tâche à réaliser, je réponds sans hocher la tête, ni le regarder ni sourire : il ne perçoit ni mon attention, ni ma motivation à effectuer cette tâche. Il peut penser que je ne m’intéresse pas au sujet. Si je ne le regarde pas dans les yeux, il me peut me trouver fuyante. De mon point de vue, j’ai écouté et répondu, mais mon comportement non verbal en dehors de la « norme » peut déclencher une perte de confiance.

Les règles implicites des relations sociales sont peu accessibles pour les autistes. Alors que certaines personnes sont très motivées à interagir, cela leur est difficile, par méconnaissance des codes sociaux (ensemble des comportements attendus dans les interactions sociales). Cette méconnaissance entraîne une anxiété à développer ou maintenir des relations par peur des faux pas. Maintenir ces relations dans le temps, nécessite de savoir à quel rythme prendre des nouvelles, ou participer à des évènements. Ce n’est pas intuitif pour une personne autiste.

Lorsque je croise des personnes que je connais, je ne sais pas comment m’adresser à elles. Faut-il leur dire « bonjour » ou « salut » ? Lorsque quelqu’un me demande « ça va? », faut-il répondre de manière automatique ou développer ? Lorsque je suis en situation professionnelle, faut-il tutoyer ou vouvoyer mes collègues ? Si je débute une relation avec un.e inconnu.e, est ce que je peux lui faire des blagues ? On peut aussi sympathiser avec une personne, et ne pas réaliser qu’elle espère nous séduire, pendant plusieurs mois ou années (si, si).


Balancements, mouvements des mains dans l’air : des comportements « connus » dans l’autisme. Mais les comportements répétitifs sont plus larges, et possiblement plus discrets. Faire tourner la roue d’un jouet, frotter ses doigts l’un contre l’autre, enrouler et dérouler ses jambes autour du pied d’une chaise à l’école ou au bureau, se toucher continuellement la barbe, tapoter du doigt sur la table : c’est ce qu’on appelle des stéréotypies. Ces mouvements ne sont pas des tocs. Ils peuvent être arrêtés de manière volontaire. L’excitation, le stress, l’ennui, le manque de stimulation, peuvent rendre ces mouvements nécessaires car apaisants.

En réunion, il n’y a rien d’autre à faire que d’écouter et je peine à maintenir mon attention. J’ai tendance à « jouer » avec les objets qui me tombent sous la main. Je peux, sans le réaliser, appuyer de nombreuses fois sur le clip de mon stylo, en faisant un clic-clic sonore qui va me permettre de rester calmement assise, jusqu’à ce qu’un collègue le remarque et que je me sente obligée d’arrêter. Je vais chercher un autre mouvement répétitif plus discret : parfois, je dessine des centaines de ronds.

Effectuer les mêmes tâches dans le même ordre et de la même manière est un comportement classique de personne autiste. Un changement dans ces habitudes de fonctionnement peut être très anxiogène. Les autistes ont tendance à utiliser systématiquement le même itinéraire pour se rendre à l’école ou au travail, à organiser leur espace de loisir ou de travail de la même manière. Un changement ou un imprévu, même positif, peut-être très mal vécu puisqu’il constitue une impossibilité de suivre la routine initialement prévue.

J’ai rendez-vous chez le médecin, je prévois un temps de trajet, un temps dédié à la consultation, un temps pour me rendre à la pharmacie et enfin pour rentrer chez moi. J’intègre aussi un temps de « retard probable » de la consultation ; c’est ma routine et mon organisation face à un rendez-vous médical. Toutefois, si le retard est beaucoup plus important que prévu, cela constitue un imprévu qui réduit à néant le reste de mon prévisionnel pour la journée. C’est source d’angoisse importante et cela peut me mettre en difficulté.

De nombreuses personnes ont des passions. Chez les personnes autistes, cela prend une autre dimension. Elles développent des centres d’intérêts peu ordinaires, ou assez classiques mais auxquels elles consacrent un temps et une énergie hors du commun, jusqu’à d’oublier de manger ou de dormir. Ces intérêts peuvent aussi revêtir l’apparence de collections, d’accumulation d’objets et/ou de connaissances en rapport avec un sujet précis. Pour une personne autiste, se plonger dans ses intérêts est une source de plaisir, et a une fonction de régulation émotionnelle. Ces intérêts peuvent être multiples ou pas, changer régulièrement, comme être durables dans le temps. On utilise souvent le terme d’intérêts spécifiques, moins négativement connoté.

Enfant, j’ai développé un intérêt spécifique pour les mythologies grecques et romaines. J’ai lu tout ce que j’ai pu trouver sur le sujet, de jour comme de nuit, y compris des livres qui ne correspondaient pas à mon âge, à tel point que plus aucune des bibliothèques de ma ville n’avait d’ouvrage à me proposer. J’ai été très déçue lorsque ce sujet a été abordé de manière « superficielle » en cours, et encore plus déçue de constater que mes profs n’avaient que de « maigres » connaissances (qui correspondaient, en fait au niveau de connaissance habituel en population générale) à ce propos.

Les autistes ont une sensorialité particulière. Leurs sens fonctionnent en hypo (moins que la norme) ou hyper (plus que la norme) sensibilité. Les hyper et hyposensibilités sont particulières à chaque personne. On peut être sensible à la lumière, au bruit, et peu sensible au toucher, ou inversement être hyposensible aux sons et hypersensible au toucher. Un.e autiste peut avoir des hyper et hyposensibilités dans un même sens. Iel peut ne pas supporter certains bruits (hypersensibilité) et, en même temps, ne pas entendre suffisamment les voix (hyposensibilité). Les hypersensibilités entrainent de fortes intolérances aux stimuli et des surcharges sensorielles (trop de stimulations sensorielles en même temps ou pendant trop longtemps). Ces surcharges sont souvent à l’origine de crises autistiques.

Il m’est inconfortable de sortir dans la rue, car il y a de nombreux bruits de circulation. Dès que le ciel est légèrement lumineux, je dois porter des lunettes de soleil à l’extérieur : la lumière du jour est violente pour moi (hypersensibilité auditive et visuelle). Par contre, je peux plonger les mains dans l’eau très chaude ou toucher un objet qui sort du four, sans remarquer que je me brûle, ou me blesser sans m’en apercevoir(hyposensibilité à la chaleur, à la douleur).


Les personnes concernées possèdent un profil inégal de compétences. C’est une des caractéristiques particulière de l’autisme, qui n’est pas un trouble unique, mais un ensemble de troubles intriqués entre eux. Cela qui touche l’ensemble du développement neuronal.

Il y a donc une multitude d’expressions possibles de l’autisme, qui correspondent à une multitude de spécificités, et à des difficultés propres à chaque personne. Il est impossible de comparer les personnes autistes entre elles en désignant leur autisme comme « léger » ou « lourd » : c’est là que la notion de spectre intervient.

Chaque personne autiste est touchée dans les catégories décrites par le diagnostic, mais pas de la même manière. Les personnes autistes ne sont pas plus ou moins sur le spectre, comme on ne peut être « un peu autiste ». On est autiste, ou on ne l’est pas. On peut avoir certaines caractéristiques proches des critères diagnostiques, sans que cela fasse de nous une personne autiste, mais si on a toutes celles nécessaires au diagnostic, on est autiste.

Les spécificités engendrées peuvent être des difficultés, qui nécessitent un soutien. Le DSM-V définit trois niveaux, besoin de soutien, besoin de soutien important et besoin de soutien très important. Ce besoin de soutien n’est pas corrélé à un type de difficulté, mais à la somme de difficultés engendrées par les particularités.

Les profils illustrés par l’infographie suivante représentent tous trois des personnes autistes, dont les difficultés sont différentes. Leurs spécificités sont illustrées par des points : chacune a son « spectre personnel » de particularités, et se situe selon les items à des endroits différents, mais ne sont pas « plus ou moins sur le spectre« , « en haut » ou « en bas » du spectre, ou « plus ou moins autistes ». Leurs compétences sont inégales. Elles peuvent paraître plus ou moins fonctionnelles, et être plus ou moins en difficulté selon le contexte, l’environnement, leur niveau de fatigue. Chacune de leurs caractéristiques peut ressortir, même si leurs difficultés sont plus marquées dans certains domaines.


Cette exploration des Troubles du Spectre de l’Autisme constitue une première approche. Il existe de nombreuses autres manifestations de l’autisme, notamment des troubles de l’attention, des difficultés à se situer dans le temps et/ou dans l’espace, d’éventuels troubles moteurs. L’autisme a de nombreuses comorbidités possibles (TDA/H, troubles dys, épilepsie, troubles du sommeil…). Certaines personnes autistes ne parlent pas du tout, alors que d’autres expérimentent le mutisme de manière ponctuelle.

Les Troubles du Spectre de l’Autismes impliquent des aménagements correspondant aux de besoins de chacun.e, mais avant tout : une meilleure sensibilisation permet d’améliorer l’accès au diagnostic, et de combattre les idées reçues et la stigmatisation subie par les personnes concernées.

Si tu as envie d’aller plus loin, tu peux lire Si j’étais autiste ? ou consulter la page TESTS ET RESSOURCES propose une bibliographie et des autotests en ligne.

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2 réflexions au sujet de “TSA – La définition et les critères diagnostiques de l’autisme”

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