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Je commence un diagnostic TSA : Guide de préparation du premier rendez-vous

portrait en gros plan d'un homme blanc à barbe et à cheveux blanc avec des lunettes, le menton posé sur la main, qui semble scruter sont interlocuteur ou interlocutrice.

Pour soi comme pour son enfant, se lancer dans un diagnostic de Troubles du Spectre de l’Autisme est particulièrement angoissant. C’est se confronter à beaucoup d’inconnues. L’une des étapes qui cristallise le plus d’inquiétudes est le premier entretien avec le ou la professionnel.le (psychologue, neuropsychologue, parfois psychiatre) qui va débuter l’évaluation. Cet article se propose de t’accompagner dans la préparation de ce rendez-vous.

Le premier rendez-vous est un moment particulier, en cela qu’il représente une porte d’entrée vers le diagnostic officiel, donc vers la reconnaissance. La plupart du temps, il arrive après une errance diagnostique, voire après un ou plusieurs épisodes de maltraitance médicales.

Il est complexe de se sentir à l’aise dans l’exercice : alors que souvent aucun.e professionnel.le n’a évoqué l’autisme, se présenter comme une fleur en disant « moi je sais », alors qu’on est pas censé.e avoir les compétences pour, peut paraitre complètement farfelu, inadapté ou prétentieux.

Le sentiment d’illégitimité est souvent très présent. Sauf que : là où tu n’es peut-être pas légitime à t’affirmer autiste, et/ou à affirmer que ton enfant l’est, tu es tout à fait légitime dans ton questionnement. Se poser des questions sur son fonctionnement est tout à fait sain. Ce qui n’est pas légitime, c’est l’absence d’accessibilité et de fluidité du système qui te permet d’obtenir des réponses, que celles-ci soient positives ou négatives.

On a certainement essayé de te décourager, parce qu’après tout : « à quoi ça sert de vouloir coller une étiquette ? ». Dans une société où il est implicitement convenu que tout le monde fonctionne de la même manière, la démarche a de quoi déranger. Raccourci facile mais parlant : si tu es myope mais que personne ne le sait, tu consultes avec une demande légitime de diagnostic, parce que sinon, tu n’auras jamais de lunettes adaptées à ta vue. Te reprochera-t-on d’avoir recherché l’étiquette myopie ?

La méconnaissance, et le manque de sensibilisation efficiente en matière d’autisme dans la population générale, finissent de compléter un tableau où ta place ne peut qu’être inconfortable.

Si l’on ajoute que tu n’as pas forcément l’impression de maîtriser parfaitement ton sujet, et que tu fais tout de même la démarche de rencontrer une personne dont les compétences sont attestées, dans un environnement inconnu, dont tu ne sais encore pas s’il te convient et surtout s’il sera bienveillant pour toi, ton stress est légitime.

Alors, comment faire pour que le rendez-vous se passe au mieux, tant pour toi que pour la personne qui te reçoit ? Les quelques conseils qui suivent devraient te permettre d’arriver avec un argumentaire relativement objectif, et des données précieuses pour l’évaluation que tu sollicites.


Oui, j’ai bien dit se gaver, parce que ce qui caractérise l’autisme, c’est la diversité de ses manifestations. Tu peux ne pas te reconnaître dans tel écrit, mais tilter sur plusieurs points en regardant une vidéo, prendre une claque en lisant un bouquin, ou tout l’inverse. Alors : multiplie les sources de personnes concernées. Même combat si ta démarche concerne ton enfant : un.e enfant autiste ne ressemble pas forcément à un.e autre enfant autiste.

des mains tiennent un livre ouvert.

N’hésite pas à fouiller les internets, et dans ta chasse aux trésors, note ce qui te parle, ça ne pourra que t’aider. Tu ne sais pas par quoi commencer ? Pour les adultes, j’ai fait une petite liste des ressources, mais j’avoue être une petite joueuse à coté du Collectif Autiste de Belgique qui s’est carrément lâché sur le sujet ici (on pardonne leur belgitude, du coup).

Etre autiste, c’est un truc qui dure toute la vie. Et ça fait partie du processus diagnostic, que de prouver que ce que tu présentes comme manifestations aujourd’hui n’a rien de ponctuel. On affirme généralement que les premiers signes sont visibles avant 3 ans. Pas forcément simple de remonter jusque là, mais un détour vers le passé est incontournable.

tiroir ouvert d'un vieux meuble, laissant apparaître de multiples fiches d'archives.

N’hésite pas, donc à utiliser toutes les traces de ton passé : Bulletins scolaires, photos…Parfois les photos en collectif (école, centre aéré…) révèlent des choses surprenantes quand on les regarde avec un œil neuf. Un petit air à part, des postures bizarres ou inattendu, note tout ce qui te parles, tu feras le tri plus tard. Une personne autiste réalisé ici une liste des indices de son enfance, elle peut t’aider.

Si toi ou ton enfant avez bénéficié de suivis particuliers, médicaux, sociaux ou psychologiques, il en existe des traces également. Rapport éducatif, bilan psy, et même carnet de santé peuvent être riches en informations.

Si tu as dans ton entourage des gens ouverts à l’hypothèse d’un TSA, c’est le moment de les mettre à contribution. La famille peut donner des indices dans le passé et dans le présent. Les parents, grands parents, sont parfois d’importantes sources d’informations, même à leur insu. Ça fonctionne encore mieux devant un vieil album photo. C’est l’occasion de te demander si ta famille est complètement dans la norme

un père et une fille assis de face à table semblent être en train de réaliser une expérience scientifique loufoque à base de chapeaux magnétiques faits maison et d'un multimètre.

Les ami.es et collègues te parleront plus du présent, et c’est précieux : c’est souvent quand on sort du cercle intime que les particularités deviennent plus évidentes (et plus difficiles à vivre, aussi.). Un regard extérieur apporte une autre perspective, et peut permettre de réaliser des spécificités qui passent inaperçues à tes yeux.

Tu réalises une démarche diagnostique pour ton enfant ? L’avis de proches est tout aussi utile. Si tu veux revenir sur sa petite enfance, cet article répertorie les premiers signes repérables.

Maintenant que tu t’es fait une belle liste de bizarreries hétéroclites, il faut tâcher d’organiser l’ensemble. L’objectif : vérifier que ça corresponde à un cadre, celui du diagnostic de Troubles du Spectre de l’Autisme. La meilleure façon de faire le tri, c’est donc…de s’inspirer des critères diagnostiques 🙂

Mon conseil méthodo, que tu peux arranger à ta sauce, c’est de réaliser un tableau. D’abord, relis les critères diagnostiques, ensuite, fais toi une colonne « âge adulte« , une colonne « enfance » et répartis les infos que tu as glanées dans chacun des critères. Deux exemples ci dessous :

Ce tableau reprend le point 1 – Déficit des interactions et de la communication sociale des critères diagnostiques. En ligne, les trois critères de ce premier point : Compréhension et maintien des relations/Réciprocité sociale et émotionnelle/Comportements non verbaux. En colonne, Aujourd’hui/Dans l’enfance. Ca donne six cases à remplir d’exemples te concernant.

image d'illustration

Deuxième exemple avec le point 2 – Caractère restreint des comportements et des intérêts, le système est le même avec cette fois 8 cases. Les deux tableaux présentent des exemples succincts, tu peux avoir de nombreux d’autres exemples à noter, ou ne pas savoir remplir une des cases, ce n’est pas grave.

image d'illustration

L’essentiel, c’est qu’on s’y retrouve assez facilement, et que cela soit un support qui te convienne. C’est de ça dont tu vas devoir parler, sans doute pendant plusieurs rendez-vous. Plus tu parviens à le structurer en amont, mieux c’est : ta pensée sera plus organisée et tu risques moins de perdre tes moyens ou d’oublier des infos.

Tu as sans doute noté un tas de choses qui ne rentrent pas dans le tableau. Pas de panique : les particularités des personnes autistes sont nombreuses. Si toutes n’entrent pas dans les points « obligatoires » du diagnostic, elles n’en sont pas moins utiles pour te comprendre. Fais toi une colonne autres quelque part.

Tu as besoin d’un rappel avant de te lancer ? C’est ici :

Il n’existe pas de règles pour transmettre ces informations. C’est la personne qui te reçoit qui décide de sa manière de procéder. Cependant, l’ensemble des informations collectées sera utile pour établir ton anamnèse (histoire de vie).

Là où certain.es pros sont ouvert.es à l’idée d’une base écrite, d’autres sont plus réticent.es. C’est à toi de juger de ta meilleure option. S’il t’es difficile de t’exprimer à l’oral, si tu te sens particulièrement angoissé.e, transmettre le tableau réalisé est une méthode intéressante, soit par mail avant le rendez-vous, soit sur support papier le jour même, soit après.

Si ce n’est pas possible, c’est un support que tu es libre d’amener pour toi-même. Avoir structuré ta pensée en amont t’aidera à mieux formuler les raisons de ta demande, et certain.es personnes sont rassurées par un support écrit. Quoi qu’il en soit, il n’existe pas de mauvaise façon de procéder.


J’espère que cet article aura pu te rassurer dans un moment où les doutes et le syndrome de l’imposteur assaillent de nombreuses personnes en démarche diagnostique. Je t’ai présenté des conseils et une trame qui, en règle générale, aident les personnes dans ta situation. Ce n’est bien sûr qu’un exemple, qui peut permettre de se sentir moins perdu.e. N’hésite pas à te préparer de la manière qui te mettra le plus à l’aise, c’est la priorité !

Il me reste à te souhaiter un rendez-vous agréable et bienveillant qui te permette d’avancer.

Tu as déjà effectué un parcours diagnostic et tu as des conseils ?N’hésite pas à les indiquer en commentaire 🙂

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